Coulisses (3) - (Backstage (3))

De la chambre noire à l'atelier

From the darkroom to the workshop

Tirage des positifs avec des châssis-presse, vue stéréoscopique. vers 1860 (collection J. Calvelo)
Printing photographs : exposure of the negatives in printing frames, stereoview. circa 1860 (collection J. Calvelo)

Les photographes industrieux n'étaient guère disposés à se limiter à une source unique de revenus. La plupart des professionnels du Second Empire qu'a retenus l'histoire de la photographie ont pratiqué à la fois le grand format, la vue stéréoscopique et même, pour certains, la minuscule carte de visite. La liste de ceux qui se sont distingués dans au moins deux de ces formats serait interminable : Adolphe Braun, Hippolyte Bayard, Francis Bedford, Bertall, Alexandre Bertrand, Edouard Baldus, Antoine Claudet, William England, Roger Fenton, Jean Laurent, Nadar, Carlo Naya, Robert Rive, Camille Silvy, Giorgio Sommer, George Washington Wilson, et j'en passe (beaucoup)…

De temps à autre, les tirages stéréoscopiques livrent un échantillon de ces séances impliquant plusieurs chambres noires et, sans aucun doute, plusieurs opérateurs. L'on y aperçoit des appareils de prise de vue de tailles variées dirigés vers les mêmes monuments, parfois sous différents angles. Il est certain que ces photographes arrivaient dans le théâtre des opérations munis d'un attirail diversifié et ramenaient de leurs campagnes, après ces prises de vue quasi simultanées, des négatifs adaptés à une large gamme de prix et d'usages : grandes albumines destinées aux albums de voyage ou vues stéréoscopiques plus intimistes.

Cette vue du château de Moléans en Eure-et-Loir, signée par le couple Brossier-Charlot (Louis Henri Brossier et Renée Charlot), nous montre, assez curieusement, une imposante chambre noire (destinée, par conséquent, aux images de grande taille), comme une « verrue » devant une figuration plus académique de l'édifice.

Brossier-Charlot, Château de Moléans, près Chateaudun, vue stéréo. vers 1865-70 (coll. J. Calvelo)

Brossier-Charlot, détail de la vue antérieure.

Plus inhabituelle encore est l'image de l'église de Brou par Victor Muzet et Gabriel Joguet où sont mises en jeu presque simultanément trois chambres :

1° celle qui prend la vue stéréoscopique,
2° l'énorme chambre au premier plan,
3° plus loin, une deuxième chambre binoculaire activée par un second opérateur (l'un des deux photographes ?).

Muzet et Joguet, Eglise de Brou, vue stéréo. vers 1865 (coll. J. Calvelo)

Muzet et Joguet, détail de la vue antérieure.

Il n'est guère possible de sérieusement se fier à ce qui n'est probablement qu'une reconstitution, devenue fameuse parmi les collectionneurs de photographie ancienne, d'un atelier de fabrication de vues stéréoscopiques. Un groupe de femmes et d'hommes – véritables employés du photographe ? ou simples figurants rémunérés spécialement pour cette prise de vue ? Nous ne le saurons jamais – n'ont vraisemblablement été mis en scène qu'en fonction des contraintes du studio (lumière, superficie) et des impératifs de la composition. Si chaque emploi de l'atelier est probablement représenté dans la vue – tirage des positifs, découpe des épreuves ou des cartons, encollage, presse à marouflage –, il est douteux que, sauf à leurs débuts, des établissements faisant appel à un personnel aussi nombreux et spécialisé aient pu se déployer efficacement dans des espaces d'à peine 20 mètres carrés, comme celui qui sert de théâtre à cette mise en scène.

Anonyme (vue probablement française), Un atelier de vues stéréoscopiques, vers 1858-60 (coll. J. Calvelo)

Détail de la vue antérieure.

Follow this link to the Main page of the blog

Lien vers la page d'accueil du blog

http://stereoscope.canalblog.com/